Mbemba Diebaté, la kora au fil des générations

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Digne héritier mandingue, Mbemba Diebaté a la kora chevillée aux doigts. Ce Sénégalais vivant au Maroc depuis plusieurs années taquine à merveille son instrument de musique dont il exploite la beauté des notes au service du dialogue des cultures. 


Tout le village est réuni pour acclamer le retour du fils prodige. Dans les yeux de sa mère, la fierté de voir son fils, kora entre les mains, prêt à donner le premier concert de sa vie devant le plus beau public, les siens. Nous sommes au cœur de la Casamance, au Sud du Sénégal, dans le village de Sobaly, où Mbemba Diebaté a vu le jour dans une famille de griots mandingue. 

Cet immense empire qui s’étendait de l’Océan Atlantique jusqu’aux confins du Niger, couvrant le Sénégal, la Guinée Bissau, la Guinée Conakry, la Gambie, le Mali, etc. a vu naître ces conteurs d’histoires qui ne se séparaient jamais d’un instrument mythique, la kora. Ce jeune artiste a grandi dans une maison où la kora fait partie intégrante de l’esprit des lieux. Pour parfaire sa pratique et suite aux recommandations de sa mère, Mbemba Diebaté part, dès l’âge de 10 ans, faire ses classes auprès de son oncle, Vieux Kouyaté, qui lui a appris, 15 années durant, comment jouer et faire corps avec la kora. Le jour de son retour au village, entouré des siens et comme dans chaque rite de passage, il fut célébré et accueilli comme le digne héritier de ce legs qu’il fait perdurer en terres chérifiennes.

Kora et guembri, rencontre pas si inopinée 

Trois mois après la fin de son apprentissage, Mbemba démarre sa carrière d’artiste avec l’Orchestre National du Sénégal avec lequel il part en tournée en Inde. Durant ce voyage, il rencontre des artistes gnaouas et tombe sous le charme des rythmes du guembri. « La rencontre entre la kora et le guembri est somme toute naturelle. Le guembri trouve ses origines dans l’empire mandingue. Son ancêtre est le simbim. D’ailleurs, dans les chants gnaouas, la langue mandingue, le bambara, est toujours présente. Cette culture, cet instrument a voyagé avec les gnaouas et s’est réinventé au Maroc sous une nouvelle apparence », nous raconte Mbemba Diebaté. C’est donc tout naturellement que, de retour de sa tournée indienne, il participe, en 2016, au Festival Gnaoua d’Essaouira qui lui ouvre la porte à de nombreuses opportunités de collaborations. 

La rencontre entre la kora et le guembri est somme toute naturelle. Le guembri trouve ses origines dans l’empire mandingue.

Depuis qu’il s’est installé au Maroc, Mbemba Diebaté a travaillé sur plusieurs projets. Il a d’abord monté le groupe Bakoumba Fusion, en collaboration avec un maâlem gnaoua, donnant des concerts privés et des spectacles à travers tout le Royaume. Durant le Covid, il s’est lancé dans un autre projet de musique afro en montant le groupe Mbemba Diebaté Sobaly avec d’autres musiciens : un Sénégalais, un Ivoirien et un Français. Ils travaillent actuellement sur un album qui devrait sortir courant 2025. 

Mbemba Diebaté collabore également avec d’autres troupes comme la Compagnie Les Chemins du Monde notamment pour le spectacle de conte musical « Traces : histoires de migrant(e)s ». « Ma mission est de faire connaître la culture mandingue, la culture africaine, pour soigner les gens…», affirme-t-il. Et pour ce faire, Mbemba dispense des stages d’apprentissage de kora, (la prochaine session aura lieu en décembre à Marrakech) et des cours au sein d’écoles de la place. Il nous raconte également fièrement avoir donné des cours au Conservatoire de la Garde Royale à Rabat.

La kora, entre spirituel et sacré

Selon la légende, la kora a fait son apparition en pleine forêt et aurait appartenu à une femme-génie. A son apparence, chaque partie fait référence à un élément naturel et ses douces mélodies ne laissent jamais de marbre la personne qui l’entend quelles que soient ses origines. La preuve, ici au Maroc, Mbemba Diebaté nous confie avoir un public international qui découvre avec enthousiasme cet instrument. 

DR – Kalimba Project

Une intégration culturelle nécessaire

Au Maroc, Mbemba Diebaté se sent comme à la maison et se veut un ambassadeur de son pays natal le Sénégal car, pour lui, la culture est un vecteur important d’intégration. A travers l’Association des Artistes Sénégalais Résidant au Maroc dont il est un membre influent, il travaille à davantage faire connaître la culture sénégalaise à travers des projets visant à faciliter l’intégration des ressortissants subsahariens actifs dans le domaine de la culture.

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